Église paroissiale de la Sainte-Trinité

  • -

Église paroissiale de la Sainte-Trinité

CATEGORIE : Histoire , Patrimoine

Naissance de la paroisse et de l’église

Avant 1760, les Contamines n’étaient que le « quartier d’en haut » de la paroisse de Saint-Nicolas de Véroce. Il fallait plus d’une heure de marche pour se rendre à l’église paroissiale de Saint-Nicolas, marche périlleuse lors des crues du Bon Nant et de ses affluents, marche difficile par temps de gel et de neige. Et quand on allait chercher le prêtre pour administrer les derniers sacrements, il arrivait parfois trop tard !

En 1751, la demande de création de la paroisse des Contamines est faite auprès de l’évêque d’Annecy. Elle tient en trois pages, mais le procès qui s’ensuit, opposant les Contaminards à Saint-Nicolas, noircira douze cents pages et durera dix ans. Finalement, la sentence autorisant l’érection de l’église arrive le 24 juillet 1758.

Un contrat est aussitôt signé avec Domenico Gualino, maître maçon piémontais du Val Sesia, à qui l’on doit plusieurs restaurations (Bionnay, Vallorcine, Martigny) dans la région. L’église devra être achevée pour l’automne 1760. Mais le curé de Saint-Nicolas fait appel de la sentence, un nouveau procès commence qui durera seize mois. Le 24 mars 1760, Saint-Nicolas est débouté définitivement.

Les frais de procès représentent environ la moitié du prix de construction de l’église !
Toute la population, avec enthousiasme, offre sa peine et son argent, et de riches expatriés en Allemagne et Autriche font de généreuses donations pour financer cette église.

Le maître maçon décède avant la fin du chantier, son propre fils Joachim le remplace et termine la construction.
L’église dédiée à la Sainte Trinité est consacrée par l’évêque en 1766.

Le clocher

Le site n’est pas choisi au hasard, l’église est implantée sur les ruines du château de Montjoie, ancienne place-forte moyenâgeuse. Le clocher, édifié sur une ancienne tour du château, est initialement coiffé d’un simple toit à quatre pans, comme le montre un croquis du peintre anglais Turner en 1802. Après la période napoléonienne, cette pyramide est surmontée d’un lanternon octogonal, d’un bulbe aplati et d’une aiguille d’une grande finesse qui s’élève entre les Dômes de Miage et le Mont-Joly.

La façade

Elle est structurée par quatre pilastres de tuf, surmontés par des chapiteaux corinthiens et un entablement horizontal en stuc. Deux cartouches floraux surmontent les niches abritant Saint Pierre (à gauche) et Saint Paul (à droite). Au centre, le porche est encadré de pilastres aux chapiteaux doriques. Les arcs de son tympan encadrent la statue du Bon Pasteur, surmontée par la serlienne et l’arc en plein cintre de l’entablement, aux courbes en harmonie.

Le large avant-toit présente trois pans rectangulaires, ornementés de rinceaux aux anneaux verts. A gauche, un losange bleu contient une croix de Saint Maurice et un douloureux visage de Christ ; à droite, la colombe du Saint Esprit ; au centre, l’Oeil de la Providence, dans un triangle entouré de rayons lumineux, nous rappelle que Dieu voit tout.

L’ensemble symbolise la Sainte-Trinité, à laquelle est dédiée l’église, comme le rappelle l’inscription latine « IN NOMINE PATRIS ET FILII ET SPIRITUS SANCTI ». Celle-ci semble reposer sur deux piédestaux rouges, décorés d’une marguerite blanche, surmontés de pots à feu aux flammes écarlates. Un oculus, ornement baroque typique, s’ouvre sous l’inscription.

La porte, dessinée par le sculpteur valsesian Albertini, présente des cartouches de grande finesse exécutés par Hudry et Pagnez, artisans locaux de Viuz-en-Sallaz. Le portail et les statues de la façade sont inscrits aux monuments historiques.

Aux angles, quatre tirants en fer forgé composent la date de construction : 1759.

Sur le mur sud, un cadran solaire invite à la réflexion …

L’intérieur

Une seule nef, sans transept, est partagée en trois travées par des arc-doubleaux appuyés sur des pilastres saillants et prolongée par un chœur plus étroit. Sur les pilastres, les croix de consécration, croix de Saint Maurice vermillon avec couronne royale.

Les corbeaux support des voûtes respectent l’architecture baroque locale : architrave blanche, frise rouge à motif doré, corniche et tailloir. Les peintures murales des voûtes datent de 1881 – 82. Aux clés, des médaillons pourvus d’une croix ; dans les voûtains, des figures de saints : Saint François de Sales et Saint Guérin (première travée) ; les quatre évangélistes dans la seconde ; le Christ et la Cène dans la troisième ; au chœur, un Christ qui bénit.

A la clé de voûte de l’arc triomphal, au décor de feuillage stylisé, est suspendu un émouvant Christ en croix, au visage serein, œuvre probable des auteurs de la porte. Trois anges baroques recueillent le sang qui s’écoule des plaies du crucifié.

Le retable central

Les retables originaux dessinés par Albertini ont souffert à l’époque révolutionnaire, les retables actuels datent de 1840 et sont de style néoclassique. Seuls quelques éléments, tels des angelots, ont pu être réemployés.

Le retable du maître-autel s’élève sur trois niveaux. L’attique (étage supérieur), à la polychromie délicate, est placé sous un dais à festons et présente un cœur couronné au centre d’un médaillon entouré de rayons d’or de longueurs différentes. Quatre anges potelés jouent de la trompette sur l’entablement qui s’appuie sur six colonnes lisses couleur jaspe, partageant l’étage médian en trois compartiments. Au centre, le tabernacle cache en partie une peinture de la Sainte-Trinité. A gauche, une haute niche abrite une statue de Saint Augustin tenant un cœur, à droite Saint François de Sales présente un livre, son Traité de l’amour de Dieu.

Le tabernacle, peu conforme aux canons de l’art baroque, est imposant, avec ses quatre colonnettes jaspe à chapiteaux composites. Sous le rideau à festons, une croix à rayons dorés s’élève sur le rocher du Golgotha, où l’on voit le crâne d’Adam. La porte est ornée d’un pélican qui nourrit ses petits de sa chair et de son sang.

Les retables latéraux

Disposés obliquement, leur construction est symétrique. Couronnés par un dais porté par deux volutes, et une couronne royale. Des anges assis voisinent avec de grands pots de fleurs sur les entablements ornés, comme le retable principal, de « rangs de dés ». A l’étage médian, trois compartiments accueillent autant de statues en bois polychrome. Les autels à deux gradins sont décorés en faux marbres.

A gauche, le retable du Rosaire est couronné par une composition autour d’un cœur entouré par quatre angelots et seize faisceaux de rayons dorés. Il présente une Vierge à l’Enfant (niche centrale) entourée de Sainte Marguerite et Sainte Agathe, tenant le plateau sur lequel son bourreau à placé ses seins.

A droite, le retable de Saint Joseph est couronné par l’œil de la Providence, avec aussi ses anges et rayons. Saint Joseph au centre est entouré par Saint Pierre levant la clé et Saint Paul tenant l’épée.

Le tableau de la Crucifixion

Sur le mur nord, une peinture sur toile, datant de la fin du XVIIe siècle, montre Saint François de Sales, Saint Michel, Saint Jérôme et Saint Guérin qui assistent à la Crucifixion, sous l’œil d’autres saints placés au dessus de la croix, galerie de personnages semblant étrangement extérieurs à la mort du Christ, qui montre lui aussi un air assez paisible. Ce tableau, provenant d’une ancienne chapelle du hameau de la Berfière, est aussi inscrit aux Monuments Historiques.

Vue du jardin Samivel, l’église devant le Mont-Joly